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Tête-à-tête avec la SNSA (2)

Publié le 26/02/2025
En 2022, Anna Rathsman, PDG de l'Agence spatiale suédoise (SNSA), nous confiait sa pleine adhésion à la démarche du SCO pour intensifier l’engagement de son pays dans l'action climatique. Aujourd’hui, Selima Ben Mustapha, responsable des applications d'observation de la Terre à la SNSA et point focal pour le SCO, confirme la concrétisation de cette volonté avec la labellisation SCO de deux projets particulièrement innovants.

Selima Ben Mustapha, parlez-nous un peu de vous et de vos responsabilités spécifiques au sein du SCO.

Selima Ben Mustapha SNSA

Selima Ben Mustapha lors des “spectromesures” sur le lac Vänern. © SNSA

Selima Ben Mustapha : Je suis responsable des applications d'observation de la Terre à l'Agence spatiale suédoise (SNSA). Également le point focal suédois pour le SCO, mon rôle consiste à participer à la gouvernance de l’initiative en prenant part aux réunions du comité de pilotage afin d'aider à guider l'orientation stratégique du SCO. Je m'engage à coordonner et à soutenir des projets innovants visant à surveiller et à atténuer les impacts du changement climatique en Suède. Je représente également la Suède dans les processus de prise de décision et je suis membre du groupe international d'examinateurs du SCO, qui participe directement au processus de labellisation des projets. Enfin, je suis membre du comité de programme du SCO.

Quels sont les projets du SCO Suède ?

S.B.M : Depuis 2021, le SCO a accrédité deux projets en Suède. Nous sommes impatients de voir davantage de contributions suédoises à la mission du SCO, qui se concentre sur l'exploitation des données spatiales pour la résilience et l'adaptation au climat. Le projet EO4WFD développe des indicateurs de qualité de l'eau par satellite pour l'eau douce, en particulier pour la gestion nationale de l'eau, en complément des méthodes existantes dans le cadre de la directive-cadre sur l'eau (DCE). De son côté, le projet SwedCoast-BlueCarb relève d’une collaboration avec l'UKSA pour cartographier les habitats stockant du carbone bleu (herbes marines et macroalgues) dans les zones côtières suédoises, cruciales pour la séquestration du carbone et la restauration des écosystèmes.

Quels sont les principaux impacts de ces projets sur les communautés locales et les efforts en matière de climat ?

S.B.M : Le projet EO4WFD améliore la capacité à surveiller et à gérer efficacement les ressources en eau en développant des indicateurs de qualité de l'eau par satellite pour les lacs qui sont des sources critiques d'eau potable. Par exemple, le lac Vänern fournit de l'eau potable à plus de 800 000 personnes. Ce projet permet donc de préserver ces ressources vitales et contribue aux efforts plus larges de résilience climatique.  Pour sa part, SwedCoast-BlueCarb devrait avoir un impact positif sur les communautés locales en améliorant la gestion des côtes et en préservant les habitats des zostères, ce qui pourrait augmenter la production de poissons. En fournissant des données sur le carbone bleu et la qualité des eaux côtières, il contribue également à la lutte contre le changement climatique.

Quelles sont les technologies innovantes utilisées dans ces projets et comment améliorent-elles la collecte de données climatiques ?

S.B.M : Ces projets utilisent des missions satellitaires avancées telles que Sentinel-2, Sentinel-3, EnMAP et des ensembles de données commerciales comme WorldView. En outre, des drones et des méthodes basées sur l'intelligence artificielle sont utilisés pour cartographier et évaluer des données environnementales telles que la répartition des zostères et la qualité de l’eau. Ces technologies et méthodologies innovantes améliorent la précision, l'évolutivité et l'efficacité de la surveillance des systèmes d'eau douce et, pour la cartographie des zostères, elles améliorent la qualité des données, l'accessibilité et la précision de la cartographie de l'habitat.

Selon vous, comment les collaborations internationales renforcent-elles les objectifs du SCO ?

S.B.M : La collaboration est essentielle au travail du SCO et fait partie de l'ADN de notre agence, qui travaille activement avec divers pays et organisations dans le cadre de projets liés à l'espace. Par exemple, le projet SwedCoast-BlueCarb, réalisé avec l'UKSA, vise ainsi à renforcer nos relations avec le Royaume-Uni dans le domaine du climat et de l'environnement. Ce type de partenariat facilite les échanges entre les pays et permet d'atteindre les objectifs du SCO en combinant diverses expertises, en partageant les connaissances et en développant des outils qui peuvent être adaptés à différentes zones géographiques confrontées à des défis climatiques similaires. Il enrichit le portefeuille de projets SCO et accroît sa visibilité en contribuant à faire connaître les avantages des technologies spatiales au service de l'action climatique.

Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontés dans vos projets ?

S.B.M : L'un des plus grands défis est d'assurer le financement de tous les projets proposés, car les restrictions budgétaires peuvent empêcher le développement de solutions prometteuses. Les projets peuvent également se heurter à des verrous techniques, qu’il faut lever. Je pense par exemple à SwedCoast-BlueCarb qui a du mal à cartographier avec précision la végétation sous-marine, car l'absorption de la lumière par l'eau peut limiter la détection par satellite.

Voyez-vous des possibilités pour améliorer encore les efforts SCO ?

S.B.M : Pour améliorer l'impact du SCO, nous devons en accroître l'accessibilité et la portée, en veillant à ce que les outils et les ressources soient largement disponibles et conviviaux pour les décideurs et le public. En outre, un mécanisme de financement plus solide est essentiel pour soutenir la mise en œuvre et l'élargissement des projets labellisés par le SCO, ce qui permettra de développer des solutions plus innovantes. En tant qu'évaluateur, je me sens parfois frustrée lorsqu'un projet très intéressant n'est pas retenu en raison d'un manque de budget.

Quels sont les projets futurs de la SNSA en matière de lutte contre le changement climatique et comment voyez-vous l'évolution du rôle de la Suède dans le SCO ?

S.B.M : La Suède travaille activement à l'élargissement de sa participation au SCO en développant de nouveaux projets et en encourageant d'autres partenaires suédois à se joindre à elle. La SNSA donne la priorité à l'utilisation des données spatiales pour le développement sociétal et industriel, en accord avec les objectifs du SCO. Forte de son expertise dans le domaine de la recherche spatiale et du centre spatial d'Esrange, la Suède exploite depuis longtemps les données spatiales dans le cadre d'initiatives liées à l'environnement et au climat. L'innovation est au cœur de notre travail : en utilisant des technologies de pointe et des méthodologies basées sur l'IA, nous pouvons fournir des scénarios d'action pour l'adaptation au changement climatique. La collaboration internationale avec les autres membres du SCO reste essentielle pour le partage des connaissances et le développement de solutions reproductibles pour les défis climatiques mondiaux. En outre, la Suède s'est engagée à tirer parti de la technologie spatiale pour la résilience et l'adaptation au changement climatique grâce à des projets tels que le satellite météorologique arctique (AWS), en collaboration avec l'ESA. Ce satellite améliorera la surveillance du climat dans les régions polaires. En outre, la collaboration entre Φ-lab Sweden et AI Sweden vise à intégrer l'IA aux données spatiales afin de créer des solutions innovantes pour les projets SCO.

 

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L'Agence spatiale nationale suédoise (SNSA) est une agence gouvernementale centrale qui dépend du ministère de l'éducation et de la recherche. La SNSA est responsable des activités nationales et internationales liées à l'espace et à la télédétection, principalement la recherche et le développement.