Fermer

ORION livre des outils inédits pour le milieu montagneux

Publié le 09/10/2023
Fidèle à son domaine d’études « le vivant en montagne », le CREA, Centre de Recherche sur les Écosystèmes d’Altitude, a développé avec ORION des indicateurs innovants, capables de faire le lien entre nature, pratiques humaines et changement climatique.

Rappelons-nous : le projet avait démarré à l’automne 2021 dans un espace virtuel pour échanger, de façon immersive, sur les attentes et objectifs d’ORION. Vingt mois plus tard, la méthode a fait ses preuves, avec des indicateurs précieux pour les gestionnaires de montagne, en l’occurrence la Communauté de communes de la Vallée Chamonix Mont-Blanc (CCVCMB), partenaire historique du CREA Mont-Blanc, pilote du projet.

Pour la petite histoire, le projet ORION est né :

🏔 d’un constat : le manque d’outils et d’informations sur  la dynamique des landes, ces ligneux bas comme le rhododendron, dont l’expansion est probablement favorisée par le changement climatique et qui provoque un appauvrissement de la diversité floristique, principale ressource pour la faune sauvage comme pastorale.

🛰 d’une avancée technique et scientifique : en 2016, le CREA Mont-Blanc et le laboratoire d’écologie alpine LECA sont parvenus, à travers de nouveaux canaux du proche infra-rouge des satellites Sentinel-2, à détecter l’accumulation de pigments rouges au sein des canopées de landes, notamment à l’automne, ouvrant la voie à une détection fine des habitats par imagerie spatiale.

Pour apporter des éléments concrets aux gestionnaires de la CCVCMB, le projet a produit à partir d’images Sentinel-2 :

  • Une cartographie fine de 11 classes d’habitats, validée grâce à une remarquable mobilisation de bénévoles sur le terrain (142 relevés d’habitats, 11 000 mesures de hauteur et du sol, reconnaissance de 22 785 plantes) 
    👉 L’imagerie Sentinel-2 offre 3 grandes valeurs-ajoutées :
    • Une résolution de 10 m, bien plus précise et riche d’information que les outils disponibles qui sont à l’échelle régionale (OSO) et européenne (Corine Land Cover) ;

    • L’automatisation : la carte peut être mise à jour dans les années à venir avec de nouvelles images Sentinel-2.

    • L’adaptabilité : l’outil peut évoluer, par exemple pour ajouter une classe rocheuse faiblement végétalisée afin de suivre la colonisation végétale favorisée par le retrait des glaciers. [Ndlr : ce phénomène fait notamment l’objet de l’étude Future emergence of new ecosystems caused by glacial retreat (L'émergence future de nouveaux écosystèmes provoquée par le retrait des glaciers) parue dans la revue Nature en août 2023.]

Extrait carte Orion

Extrait de la carte des habitats dans le périmètre des réserves naturelles de la CCVCMB. Grâce aux dernières générations de satellites, ORION parvient à distinguer les landes (ici en rouge), une cible complexe à capturer car cette végétation rase, souvent en mosaïque, est imbriquée avec des prairies et des rochers. © CC BY 4.0 CREA Mont-Blanc

  • Des indicateurs de diversité floristique et faunistique, obtenus en croisant les résultats d’ORION avec ceux du réseau de pièges photos mis en place par le CREA. Faisant le lien entre habitat géospatial et structure d’habitat disponible et favorable aux espèces, ces indicateurs sont des clés pour affiner les plans de gestion et de consommation de certaines espèces. Dans cet esprit, le projet Herbiland, également porté par le CREA qui le considère comme un prolongement d’ORION, se consacre à une meilleure compréhension des interactions faune / flore dans le milieu landes.

  • L’identification des zones vulnérables (à forts enjeux) : ici le CREA s’est attaché à développer un indicateur de suivi adaptatif des alpages en lien avec la gestion pastorale et le changement climatique (quelle surface peut être exploitée par les troupeaux). Cela peut servir, par exemple, à estimer s’il est pertinent de garder tel ou tel espace ouvert, voir si le changement climatique favorise l’expansion des landes à la place des prairies…

Orion Suivi surface pâturable

 

◀︎ Indicateur par suivi satellite d’une surface pâturable développé dans le cadre du projet ORION. © CC BY 4.0 CREA Mont-Blanc

Aujourd’hui, le CREA partage les résultats d’ORION directement sur le (splendide) site institutionnel de l’Atlas du Mont-Blanc :
👉 page Prairies alpines, poches de résistance pour comprendre les enjeux ;
👉 page Suivi satellite d’une « surface pâturable » pour voir les indicateurs développés.

La page projet ORION a également été mise à jour pour récapituler enjeux, méthodes et résultats, dont le rapport final disponible au téléchargement.

 

La parole aux utilisateurs

« Un alpage qui n’est plus ou mal pâturé se recouvre rapidement de landes et perd son intérêt économique, qu’il est difficile voire impossible de retrouver. Nous attendons beaucoup d’un outil comme ORION, capable de nous apporter une vision globale et quantifiée de l’évolution des différents milieux sur le territoire, qui plus est dans le contexte de changement climatique. » Jean-François Deshayes, Conseiller délégué à la Commission Espaces Naturels, Agropastoralisme et Forêts de la Communautés de Communes de la Vallée de Chamonix Mont-Blanc

« L’outil créé dans le cadre d’ORION pourrait faciliter le suivi mené dans le cadre des réflexions que nous menons sur l’impact et le rôle du pastoralisme dans les dynamiques de certaines formations végétales, notamment les landes. Si les résultats viennent à montrer des évolutions très lentes ou absentes, nous pourrions les utiliser pour préconiser la libre évolution des milieux plutôt que l’interventionnisme par exemple. L’outil pourrait également servir sur les aspects liés au changement climatique, par exemple pour notre projet Ice and Life sur les marges proglaciaires. Reste à valider la précision obtenue via l’outil, en faisant un comparatif avec nos données. » Carole Birck et Lisa Wirtz, respectivement Chargée de mission Stratégie scientifique et Chargée d’étude expertise au Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Savoie ASTERS.